Tribune n°29 (mai 2006)
LES RAYONS SONT TROP SOUVENT LE REFLET DE L’OFFRE ET NON DE LA DEMANDE
Mieux allouer les mètres-linéaires
A l’heure où les marchés PGC sont en pann de croissance, comment organiser la reconquête ? Pour y répondre, Tribune Grande Conso ouvre son “Forum” à différents experts des métiers du commerce : merchandising, promo, publicité, achats, etc.
Premier invité, Dominique Mouton, directeur-associé de Mathêma Partners.
C’est l’histoire d’un côté d’une marque qui – comme tant d’autres – a fait de la conquête de la part de linéaire la base de sa stratégie et, de l’autre, d’une enseigne qui – comme tant d’autres – accepte quasiment sans sourciller l’essentiel des innovations qui lui sont proposées. A l’arrivée, voilà partout les assortiments larges et profonds. En alimentaire, comme en non-alimentaire. Chez les généralistes comme chez les spécialistes. Et l’absence quasi-généralisée d’une véritable réflexion sur l’allocation des ressources en mètres linéaires conduit à une situation tout à fait discutable : les linéaires sont de plus en plus dimensionnés en fonction des structures de gammes, et non en fonction de leur performance ! Ce qui se traduit en conséquence par le surdimensionnement de catégories à faible rendement et, à l’inverse, au sousdimensionnement de catégories à fort rendement. Ubuesque ! Et incompréhensible alors que la conquête de chiffre d’affaires doit désormais s’effectuer à surface quasi-constante. Autant dire que “l’historique” ratio de CA/m2 doit redevenir l’alpha et l’oméga de la stratégie de tout magasin. Des choix difficiles et contraignants L’optimisation du rendement d’un hyper, d’un super ou encore d’une grande surface spécialisée passe donc par la réallocation de l’espace linéaire selon la demande des consommateurs et non plus selon l’offre des industriels. Banalité ? Loin s’en faut… L’expérience (notamment les missions que nous menons chez Mathéma Partners) nous démontre l’inverse. Sur le terrain, à l’heure de justifier ses choix, les “c’est une particularité locale”, “il faut l’assortiment le plus large”, ou encore “la concurrence fait ainsi” sont autant de réactions sincères mais irrationnelles ! Elles ne correspondent pas à des facteurs quantitatifs véritablement et économiquement utilisables. Prenez le choix offert au consommateur. Trop souvent c’est au nom de ce “choix” que l’enseigne légitime son incapacité à reconsidérer les assortiments. Alors que le choix est une notion relative – et non factuelle – car issue d’une perception. A l’évidence, arbitrer les allocations de linéaires selon la demande et non plus l’offre sera parfois difficile et contraignant. Soit. Mais peut-on encore aujourd’hui raisonner sa politique marchandises et son merchandising autrement qu’en prenant comme postulat de départ les performances réelles de chaque catégorie, donc la demande du consommateur, et non simplement l’offre de l’industriel ? Le mètre carré commercial est rare et cher. Et les marchés PGC souvent matures. Conséquence : seule l’optimisation des linéaires peut ouvrir la voie de la reconquête. Et, en la circonstance, marques et enseignes en sont co-responsables.
D. MOUTON
PORTRAIT Auteur d’un premier ouvrage sur le merchandising en 1989 aux Editions d’Organisation, et co-auteur de « Pratique du Merchandising » (Dunod, 2004), Dominique Mouton intervient en conseil sur le sujet depuis de très nombreuses années. En 1994, avec Gaudérique Paris, il fonde MATHEMA PARTNERS, une des rares structures en France a avoir intégré au même niveau les savoir faire merchandising et design. Aujourd’hui MATHEMA PARTNERS intervient aussi bien auprès des marques qu’auprès des enseignes dans les domaines du category management et du merchandising / design.