L’avez-vous remarqué ? Nombre de familles cédant leurs affaires – c’est souvent dans l’industrie – peinent à encaisser dans la sérénité le chèque qu’elles recoivent. Et c’est généralement la même litanie : le patron, la main sur le cœur, jure ses grands dieux qu’il n’avait d’autre choix pour assurer l’avenir de l’affaire, voire pour lui offrir le grand destin qu’elle mérite (et ses salariés avec). Touchant. Au point qu’on en viendrait presque à le plaindre de se retirer les poches pleines et généralement au soleil ! Parfois – il est vrai – l’argument fait sens. L’entreprise est moribonde et la céder est la dernière chance. Comme le cardiaque que l’on tente de choquer une dernière fois, pour ne rien regretter.
Nouvel exemple en date aujourd’hui : le glacier Rolland, inconnu ou presque du grand public (sauf dans sa Bretagne natale), et pourtant troisième fabricant français. La famille Rolland a annoncé hier qu’elle projetait de céder le contrôle de l’affaire plus que centenaire au groupe R&R Ice Cream. Intention louable et légitime, c’est incontestable. Pourquoi vendre ? « Pour continuer à se développer », rapporte ce matin Ouest-France. Et le quotidien de citer « une source proche du dossier » dont le commentaire vaut son pesant de cacahuètes. « Le groupe Rolland avait besoin d’une assise financière, de s’appuyer sur un partenaire pour continuer son développement. S’associer à R&R Ice Cream évite de recourir à un partenaire financier. Ce qui aurait entraîné une perte d’indépendance ». Car, c’est bien connu, vendre une affaire ne représente en rien une perte d’indépendance ! Et garantit même durablement l’emploi sur un site… En tous les cas, c’est que croît mordicus le maire de Plouédern (siège d’une usine) : « Les dirigeants du groupe m’ont confirmé qu’il n’y a pas d’inquiétudes à avoir concernant les emplois. Au contraire, si j’en crois mes informations, ce rapprochement permettrait à l’entreprise de se développer ». C’est tout le mal que je souhaite à Rolland dont, il se trouve, j’apprécie les dirigeants même si je ne partage pas – vous l’aurez compris – la manière de… « vendre » la vente !