LES FAITS. La semaine dernière, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation de Comareg, la filiale de journaux de petites annonces du Groupe Hersant plus connu pour ses centaines d’éditions de ParuVendu.
C’est l’histoire d’un modèle économique qui a engendré d’extraordinaires fortunes. Un modèle qui a émergé dans les années 1970, s’est développé nationalement dans les années 1980 et a connu une impressionnante phase de concentration dans les années 1990. A l’aube du XXIe siècle, le web l’a challengé puis détrôné. Telle est, en version résumée il est vrai, l’histoire des journaux de petites annonces dont la liquidation de la Comareg est une triste étape. Triste (ne serait-ce qu’eu égard aux 1 650 salariés qui perdent leur emploi) mais si prévisible. Au point d’ailleurs de s’interroger sur la mouche qui avait bien pu piquer Philippe Hersant en 2002 lorsqu’il «gaspilla» 120 millions pour s’emparer de ce qui était alors une pépite certes (10 % de résultat), mais une pépite condamnée.
A bien des égards, le commerce contemporain ressemble aux journaux de petites annonces. Son histoire s’écrit presque à l’identique… Un modèle économique qui a engendré d’extraordinaires fortunes. Qui a émergé dans les années 1970, s’est développé nationalement dans les années 1980 et a connu une impressionnante phase de concentration dans les années 1990. Un modèle qui, lui aussi, a été challengé par le web à l’aube du XXIe siècle. Et qui, au moins partiellement, sera détrôné.
Les enseignements de l’Histoire
Comme souvent en effet, l’Histoire est riche d’enseignements pour écrire l’avenir. Toutes les formes de vente qui, par la géniale vision de quelques uns et servies par les différentes facettes du progrès, sont parvenues à casser la structure de coûts précédemment en place, se sont imposées. Au même titre que les grands magasins, les magasins populaires ou, par exemple, les grandes surfaces, le e-commerce offre à son époque l’émerveillement d’une révolution commerciale en marche. Une révolution que rien n’arrêtera, n’en déplaise à certains acteurs en place, étonnamment incrédules d’un avenir pourtant si facile à imaginer.
Sur de nombreux marchés, le e-commerce balaie l’actuelle structure de coûts. Illustration avec la dématérialisation des biens culturels. Autre exemple : la centralisation en quelques lieux seulement de stocks coûteux pour les produits d’équipement (Casino l’illustre à merveille avec 114 hypers Géant Casino mais un seul entrepôt Cdiscount). Sans négliger les rapports prix/poids parfois très avantageux qui rendent quasi indolore le coût d’une livraison d’autant plus compétitive que la «science» des flux marchandises est aujourd’hui bien établie.
Un mouvement lent, mais irréversible
Naturellement, l’alimentaire sera aussi peu impacté que le non-alimentaire sera ébranlé. Quels rayons non-al d’un banal hyper seront à l’identique dans 10 ans ? Bien peu en vérité, hormis ceux pour lesquels l’expérience d’achat peut revêtir une valeur certaine. Soit parce que la vue, le toucher ou encore l’essayage font sens. Soit parce que la préméditation de l’achat est faible et que flâner ou hésiter est un préalable à la décision. Mais pour de nombreuses catégories, la bascule off-line / on-line est enclenchée. Bien sûr le mouvement sera lent, comparé au court-termisme ambiant. Mais il est irréversible. Le nier – comme Comareg il y a peu encore – revient à se protéger d’un tsunami annoncé derrière des sacs de sable. Utiles pour ne pas voir la tempête au loin. Et pourtant si futiles le moment venu pour espérer en réchapper.
Olivier Dauvers
Excellent.
Olivier, ne seriez-vous pas là en train de sceller le sort des grands hypers ? Que feront-ils de leur moitié de surface non alimentaire lorsque le online aura fait son oeuvre ?
Ouh la la, je ne “scelle” pas le sort des grands hypers !!! Je donne un point de vue que j’essayer d’argumenter 😉
Cela dit, je suis convaincu qu’un tiers de la surface des grands hypers sera inutile à moyen terme. Et que le développement du e-commerce pose un problème de valorisation de l’immobilier commercial. Mais je reviendrai sur le sujet prochainement…
Olivier
Peut être à terme le développement des concessions directement en hypermarché, sur le modèle des grands magasins, mais avec des marques de PAP ? Ou alors directement des relais e-commerce en magasin (relais pixmania, amazon ?)
Et si le futur Wal Mart s’appelait Amazon ?
Amazon est déjà le commerçant qui vend le plus de références différentes dans le monde et sa son business model va faire mal.
La vraie question est : combien de temps cela prendra-t-il ?
Plus vite qu’on ne le pense. Bravo Olivier pour cet article visionnaire une fois de plus 😉
très bon article. Concernant les hypers, Quid les lieux dits de destination et des lieux de passage… deux lieux très différents => attentes conso différentes.
Bon article en effet mais qui oublie les aspects écologiques et les coûts non pris en compte du transport routier et de la destruction d’espace agricole.
Je m’explique, le jour ou la société fera payer véritablement ce que coute la construction et l’entretien du réseau routiers par un système de péage, que l’exploitation de chauffeurs routiers d’europe orientale cessera, que le gachis de terre agricole par les immenses entrepôts logistiques et par la pavillonite (favorisant l’e-commerce) fera l’objet d’une véritable taxe pour surface agricole détruite, alors là ce n’est pas certain que le modèle qui est en train de se dévelloper soit viable.
L’avenir ne serait pas justement aux systèmes des filiaires courtes ?