LES FAITS. Auchan a annoncé la nuit dernière son retrait de Chine. Actionnaire majoritaire (à 36,18 %) de SunArt Retail, aux côtés d’Alibaba (36,16 %), le groupe français cède sa participation au géant du net pour 3 milliards d’euros. Une “sortie” du plus grand marché du monde (au moins en nombre de consommateurs) qui intervient un an après Carrefour. Deux destins parallèles…
Le loup était donc bien entré dans la bergerie. En 2017, en ouvrant sa filiale chinoise à Alibaba, Auchan réfutait l’analogie. Non, le géant chinois n’était pas un prédateur et le Français une proie. Trois ans plus tard, l’histoire s’écrit – hélas – comme anticipé. Certes, dans la grande tradition chinoise, aucune humiliation dans la transaction en cours. L’annonce officielle est un modèle de diplomatie appliqué aux affaires : “Trois ans après la signature d’une alliance pour développer le commerce phygital alimentaire en Chine, alliance qui a démontré toute sa pertinence et son succès, Auchan et Alibaba ont engagé ensemble une réflexion concernant le futur de SunArt. Ayant conjointement constaté la spécificité du marché chinois, Auchan a accepté la proposition faite par Alibaba de rachat de la totalité de sa participation dans SunArt”. En clair, l’alliance est un succès mais… celui qui a la main l’abandonne.
Après Carrefour l’an dernier (qui a cédé 80 % de sa filiale au local Suning), c’est donc une nouvelle désillusion pour le retail français, à la mesure du potentiel – gigantesque – du marché. Dans les deux cas, les mêmes causes et, surtout, une même conséquence.
Pas les moyens de suivre les géants de la tech
Carrefour et Auchan avaient pour eux d’avoir “senti” le marché chinois il y a longtemps et dupliqué leur format de conquête (l’hyper) alors que les Chinois découvraient avec délice la société de consommation. Fallait voir ces parkings “dégueulant” de vélos et ces allées bondées de clients !
Lorsque les Chinois ont violemment basculé du off-line vers le on-line, Carrefour et Auchan étaient certains de la force de leur réseau de points de vente. L’un comme l’autre n’ont pu que constater l’émergence des géants de la tech : Alibaba, JD.com, Tencent, etc. Et, à l’heure de mettre quelques milliards sur la table pour suivre le rythme, Carrefour comme Auchan n’en avaient pas les moyens, fragilisés sur leurs marchés d’origine. La conséquence ? Plus profonde qu’il n’y paraît. Car les commerçants ont toujours été les meilleurs ambassadeurs de leurs pays. C’était vrai au 17e siècle avec les premiers “comptoirs” en Asie. Ça l’est tout autant aujourd’hui. Même si, par principe, l’assortiment des hypers Auchan et Carrefour était d’abord chinois en Chine, la France n’en était jamais exclue. Là aussi… par principe. Voilà pourquoi lorsque Carrefour quitte la Chine, Auchan la Chine et l’Italie, ou encore Casino la Thaïlande, c’est la France qui recule.
Olivier Dauvers
La France commerciale recule depuis longtemps. En 2003 déjà, en plein déploiement vers l’Asie et l’Italie, Auchan quittait le premier marché mondial en valeur – les Etats-Unis. Certes, bien dix ans après le départ des autres chaînes françaises, la société y avait redoublé d’efforts pour réussir, mais pourtant… Comme l’écrivait Montaigne, le monde n’est qu’une branloire pérenne… même pour Auchan, malheureusement.
Excellente analyse !
C’est comme çà qu’on le zaime not’ Lolivier 🙂