LES FAITS. Lidl a dégainé sa Foire aux Vins de printemps depuis mercredi. En vedette – et en couverture de son catalogue – un Bordeaux vendu en offre 4+2 à 1,89 € la bouteille en binôme avec un Côtes du Rhône à 1,99 €. Le reste du tract est à l’avenant avec notamment un “Bordeaux Sup’ Château” à 2,49 €.
A peine les portes du salon de l’Agriculture refermées, les promesses se seraient-elles déjà envolées ? A Bordeaux, et ailleurs dans le vignoble français, c’est la gueule de bois. L’euphorie des premières heures du salon avec un Président de la République en bras de chemise promettant des prix planchers est vite retombée. Retour à la réalité avec la Foire aux Vins Lidl (depuis mercredi et pour une semaine) et sa “vedette” : un Bordeaux à 1,89 € le col. Un “Terres légendaires” agrémenté d’une médaille d’Or Gilbert & Gaillard. Les “pros” connaissent la valeur relative (euphémisme) des distinctions des deux compères… Peu importe ! L’effet sur la ménagère (ou son mari) est certain. Nouvelle étape dans la dévalorisation des produits agricoles aux yeux des clients. Comme les côtes de porc à moins de 2 € le kilo en janvier chez Leclerc.
Dans une bouteille à 1,89 €,
de 60 à 70 centimes de vin
Derrière un flacon à 1,89 €, la structure de coûts est évidemment tendue (euphémisme, bis). Il y a donc la TVA, la marge de l’enseigne, des coûts logistiques et industriels, la matière sèche (la bouteille, le bouchon, l’étiquette) et quand même… un peu de vin ! Sans doute de 60 à 70 centimes. Soit environ 800 € le tonneau, c’est-à-dire loin, très loin, d’un hypothétique prix plancher basé sur les coûts réels de production.
Derrière cette offre, donc : Lidl, et son président, Michel Biéro, soutien affiché de prix minimum et plus généralement acteur reconnu du monde agricole pour des pratiques moins délétères que la moyenne. Fallait voir politiques et syndicalistes défiler sur le stand Lidl Porte de Versailles. Double langage de Lidl ? Plutôt l’illustration du dilemme permanent dans lequel évoluent toutes les enseignes.
D’un côté, il y a une responsabilité sociétale : les distributeurs sont des clients majeurs de toutes les filières agricoles. Directement (maraîchage par exemple), indirectement (lait), ou parfois en co-contractant (les “tripartites”). Aucune enseigne ne peut ignorer cette responsabilité. Aucune ne l’ignore totalement d’ailleurs. De l’autre, il y a la pression sociale pour des prix bas. Pire (peut-être), une… utilité sociale du discount pour une frange non négligeable de la population. En ce sens, oui, un Bordeaux à 1,89 € a une vertu. Du cochon à moins de 2 € aussi. Et comme Lidl, Leclerc et consorts ont face à eux des vendeurs, ils… achètent. C’est leur dilemme. Aussi existentiel qu’insoluble. Même pour Lidl, pourtant chouchou des paysans.
Ou alors une coopérative bordelaise ou un négociant ayant “sur les reins ” un stock conséquent d’un millésime “moyen” , avec donc un besoin très urgent de s’en débarrasser, aurait contacter Lidl dont ils connaissent la capacité à prendre tout le stock et de surcroît à payer comptant …
Ça se tient ?
C’est quand même pas toujours de la faute du distributeur…
Absolument. Mon sujet n’est de toute façon pas de blâmer l’enseigne mais de poser plus posément le problème qu’en une punch line à la TV (et j’en suis capable 😉
La responsabilité est à partager avec les vendeurs qui bradent l’image du produit et avec ceux qui décernent des médailles (sur quels critères ?) pour crédibiliser de telles offres. Pas sur que LIDL explose les ventes sur cet article, par contre c’est tout bénéfice pour l’image.
Faut-il aussi comprendre que les propriétaires portent des stocks trop élevés et qu’il faut “vider” pour retrouver de la trésorerie ? Les ventes à l’exportation souffriraient-elles (je doute que ce soit sur de tels produits…) ? Les acheteurs étrangers souhaitent-ils aussi protéger leurs producteurs ? Ou tout simplement, l’offre (et donc la production) est trop importante vs la demande ?
Il a eu réponse avant tout le monde…
Quand on pense qu’il suffirait que les gens n’achètent plus pour que ça ne se vende pas ! Coluche
Les politiques ont tendance à oublier l’écart entre les déclarations des consommateurs et leurs comportements effectifs
(et aussi on oublie qu’au départ la foire au porc est née… De la demande des producteurs !)
Ne pas oublier que le vin passe sérieusement de mode, je suis dans la vingtaine et en dehors de mes darons personne ne boit du vin dans mes cercles proches.
Il suffit de voir que la bière est la boisson préférée des Français et également la plus vendue.
Ce n’est pas qu’une crise du prix du vin, c’est une crise du vin tout simplement 😉
La vraie question est : ” Ce vin est-il bon ou une abominable vinasse ? ”
Ce qui veut dire que c’est soit une dégradation honteuse d’un produit qui ne le merite pas, soit c’est encore trop cher et Lidl arnaque ses clients ?